Je ne pense pas qu'un nouveau triangle - les États-Unis, la Chine et la Russie – peut se faire jour. Dans ce triangle les cathètes et l'hypoténuse tout simplementne ne convergeront jamais.
- J’appartiens à une très petite cohorte de gens qui étaient convaincus que Trump va gagner. On ne peut pas le comparer avec Reagan, parce que Reagan avait un programme très précis, et il avait aussi une équipe très forte. Aujourd'hui, Trump a trois équipes de conseillers. La première, c'est, en fait, sa famille, même si aucun des présidents des Etats-Unis n'avait jamais de parents qui faisaient partie de la présidence. Le deuxième groupe est disposé en faveur de la lutte jusqu'à être arrivé à ses fins contre l'islam. Parce que dans tous les discours de Trump la lutte contre le terrorisme et la lutte contre l'islam sont déjà clairement identifiées comme les principales directions de la politique étrangère. Et le troisième groupe de conseillers c’est des conservateurs qui sont forts au congrès et dans l’establishment politique american. C'est le groupe le plus fort qui croit toujours que les États-Unis ne doivent pas perdre le leadership. Ils sont convaincus que les Etats-Unis doivent tout de même prétendre à un rôle de puissance de pointe dans le monde. Juger de Trump en tant que personne, c'est difficile. Il est une personne très spécifique. Jamais une personne si intéressante (vous ne pouvez pas le nier) ne venait du business et ne prenait un si haut poste politique.
En présupposant des changements dans l'architecture de relations entre les États-Unis et la Russie, je ne pense pas qu'un nouveau triangle - les États-Unis, la Chine et la Russie – peur se faire jour. Je n’y crois pas. Dans ce triangle les cathètes et l'hypoténuse tout simplementne ne convergeront jamais. Mais peuvent être faits de gestes tactiques importants qui sont capables de contenir certains risques pour l'Ukraine. C'est la question des sanctions, plus précisément la question de leur levée. Les sanctions des États-Unis ne sont pas si tangibles pour la Russie par rapport aux sanctions de l'UE. Mais du fait de ses sanctions l'Union Européenne elle-même subit de grandes pertes (à mon avis, en 2015 ces pertes s'élèvent à environ 100 milliards d'euros). Et si les États-Unis, et puis l'Europe, en suivant leur exemple, lève les sanctions, alors cela peut laisser les mains libres de la Russie. Cela ne signifie pas que la Russie va se permettre de déclencher immédiatement la grande guerre avec l'Ukraine, mais sa position sera considéblement renforcée.
Trump, c'est l'homme qui cherchera partout des avantages pour les États-Unis. Mais les États-Unis et la Russie organiquement ne peuvent pas être alliés! Partenaires – oui, mais pas alliés!
- Nous avons le mythe qui s’est formé depuis des décennies que le lend-lease c’est du confit américain que nous avons reçu presque dans les premiers jours de mai 1945.
- C'est du galimatias. Parce que j’ai déménagé avec ma famille en 1943 à Gorlivka, mon père a été câbleur. Quand son office a reçu «Studebaker» (camion american- réd.), c'était une joie pour beaucoup de gens qui ont vécu et travaillé à Gorlivka. Tous les gars venaient voir ce «Studebaker» et essayaient de grimper à la caisse de ce camion... Cela me fait sourire toujours.
- Revenons à votre livre. Dans l’un des passages vous dites que la victoire totale dans la guerre hybride n'est pas possible. Dans l’autre vous dites que finalement la guerre est gagnée par celui qui a réussi à convaincre le monde qu'il avait gagné. Parce que, tout de même, si on parle de la probabilité de la victoire?
- Je vais essayer maintenant de justifier cette thèse. La guerre hybride est vraiment sans fin. Il est possible d'obtenir un certain succès dans cette guerre, mais la gagner c'est impossible. Il n'y a aucune garantie que nous, par exemple, n’allons pas entrer à nouveau dans une confrontation avec la Russie en matière de «question de gaz». Vous savez, le 6 janvier 2006 quand a eu lieu la première coupure de gaz moi, à la demande de Victor Andriyovytch Youchtchenko j’ai donné à l'Administration du Président une conférence de presse. J’ai dit que ce n’était qu’un début, que nous aurons, en plus de cette guerre de gaz, des guerres de lait, de fromage, de saucisson, d’articles de confiserie et pas mal d'autres. Il faut être prêt à cela. On ne peut pas dire que j'ai été entendu. Les outils de la guerre hybride sont tellement multifacettes qu’il est impossible de l'arrêter complètement, ni de la gagner. Cependant, il faut travailler avec les raisons qui ont conduit à cette guerre et résister aux buts que l'adversaire cherche à atteindre.
La Russie essaie de ravoir sa grandeur, en assurant sa sécurité. Elle estime que pour atteindre ces objectifs il faut détruire l'ordre mondial existant, et elle l’a pratiquement fait. Ensuite, le Kremlin veut construire un nouvel ordre dans lequel la Fédération de Russie fera partie du trio des leaders mondiaux. Mais le Kremlin n'est pas conscient du fait que ce faisant, il a ouvert la «boîte de Pandore». Et je ne crois pas que jamais ils pourront s’entendre avec les japonais concernant les îles Kouriles. Beaucoup de conflits profonds sont déjà posés. Le monde a besoin de conversions importantes du système de la sécurité globale. Je crois que nous les aurons un jour.
- Dans votre livre vous avez clairement présenté les objectifs que la Fédération de Russie poursuit. La fédéralisation, le changement de notre cours et le statut de la langue russe. Si nous voulons éviter ce dernier, alors est-ce que cela vous paraît rationnel d’adopter la loi sur la langue ukrainienne dans sa dernière version?