Est-ce que Kyryl Vychynsky est journaliste et

Est-ce que Kyryl Vychynsky est journaliste et "RIA Novosti Ukraine" un média?

Ukrinform
Et est-ce que le commerçant Vychynsky est vraiment un " correspondant accrédité " en possession de "tout un paquet de documents ukrainiens "?

Le meurtre échoué d’Arkady Babtchenko aurait pu devenir pour le Kremlin une raison valable pour accuser l’Ukraine d’être un “failed state”, incapable de protéger ses citoyens, avec un niveau de  violence " pire qu’en Afrique ", sans liberté d’expression et qui fait la chasse aux journalistes. L’Ukraine l’est devenue, mais pour seulement un jour.

Par chance, le Service de sécurité ukrainien (SBU) a sauvé la vie de ce journaliste qui critiquait infatigablement le régime de Poutine, mais qui  a préservé l’Ukraine des calomnies provoqués par la Fédération de Russie.

Cependant, la Russie continue d’accuser l’Ukraine de vouloir " réfuter tout signe d’objectivité ",     " d’anarchie juridique, de lutte sans merci contre toute autre pensée que celle imposée par ses autorités ". Mais, elle met l’accent sur une autre affaire : l’arrestation du chef de " RIA Novosti Ukraine", Kiril Vychynsky.

Kiril Vychynsky a été arrêté à Kyiv le 15 mai 2018 et cela a immédiatement provoqué une vive réaction de la Russie.

Margarita Simonyan, rédactrice en chef de l’agence internationale des médias et de la chaîne "RussiaToday " (RT), a été l’une des premières personnes à réagir à propos des perquisitions dans le bureau de RIA à Kyiv : " Ils sont entrés de force dans notre bureau ", a-t-elle posté sur sa page Twitter, en commentant les perquisitions.  À cause de cette phrase, plusieurs journalistes ukrainiens ont commencé à chercher des informations : est-ce que les forces de l’ordre ukrainiennes mènent des perquisitions, non seulement à l’agence de "RIA Novosti Ukraine", mais aussi dans des bureaux de "RussiaToday" à Kyiv, dont tout le monde ignore l’existence et qui auraient travaillé en dépit des sanctions? "RIA Novosti Ukraine" n’est-il pas un média ukrainien indépendant, mais une représentation d’un média de propagande russe, interdit en Ukraine?

Un peu plus tard, Simonyan a compris son erreur et s’est empressée de noter que " le média "RIA Novosti Ukraine" n’est pas lié à nous juridiquement, mais il est notre partenaire d’information ".

Harlem Désir, représentant de l’OSCE pour la liberté des médias, a ajouté de la confusion en exprimant son inquiétude pour " un raid du Service de sécurité ukrainien dans des bureaux de l’agence d’information nationale russe RIA Novosti Ukraine et la chaine RT à Kyiv, ainsi que pour des perquisitions chez des journalistes et leur arrestation ". Désir a clairement parlé des représentations des médias russes en Ukraine et a exhorté le pouvoir ukrainien à s’abstenir "de l’introduction de restrictions non-fondées sur le travail des journalistes étrangers ".

Nous supposons que le principal défenseur des médias au sein de l’OSCE n’avait pas tout compris et était désinformé. En effet, il n’y a eu ni " arrestations ", ni " raid " dans les bureaux des médias russes RIA Novosti et RussiaToday, mais une arrestation et des perquisitions au bureau de RIA Novosti Ukraine. Il n’y avait pas non plus de journalistes étrangers qui " effectuaient des tâches professionnelles dans un autre État ". De plus, pour travailler à Kyiv, les journalistes et les médias étrangers n’ont pas besoin d’accréditation.

Parallèlement, le 17 mai,  le ministère des Affaires Étrangères de la Fédération de Russie a diffusé une déclaration dans laquelle Kiril Vychynsky figurait en tant que " chef de "RIA Novosti Ukraine " sans préciser s’il s’agissait du " média " russe ou ukrainien.

Donc, en lisant toute ces informations, nous n’avons pas réussi à comprendre si Kiril Vychynsky était un journaliste russe ou ukrainien, si "RIA Novosti Ukraine" était un média russe ou ukrainien et si c’est vraiment un média.

Selon des sources russes, Vychynsky serait un journaliste ukrainien qui travaillait pour un média ukrainien, malgré sa nationalité russe. " Kiril Vychynsky est un journaliste ukrainien qui travaillait dans un média ukrainien. Il est citoyen russe et son média est vraiment notre partenaire ", a déclaré Margarita Simonyan en direct à la télé.

En revanche, le jour même, Maria Zakharova, représentante du ministère des Affaires Étrangères de Russie a commenté la situation en évoquant les " médias RussiaToday et RussiaToday en Ukraine ", en soulignant aussi que les activités de ces " médias " étaient irréprochables sur le plan juridique".

" Le correspondant du média " RussiaToday " travaillait en Ukraine en tant que journaliste accrédité et son activité journalistique est la véritable raison des perquisitions et de son arrestation ", a-t-elle déclaré.

En comparant cyniquement les situations de Roman Souchtchenko, journaliste ukrainien, détenu à Moscou et Kiril Vychynsky, elle a affirmé : " Ni avant, ni pendant son séjour sur le territoire de la Fédération de Russie, Souchtchenko n’a déclaré son autorité en tant que journaliste sur le plan juridique. Par conséquent, toute comparaison de Souchtchenko avec les correspondants du média "RussiaToday" en Ukraine est tout simplement infondée, non pas pour des raisons morales élevées excessives, mais simplement sur le plan juridique ".

Selon l’attachée de presse de la diplomatie russe, les " journalistes du média " RussiaToday " ne cachaient jamais qu’ils avaient tous les documents ukrainiens nécessaires pour effectuer leurs activités de journalistes. Ils ont été accrédités, ils signaient leurs documents et organisaient des événements sur leur plateforme ".

À la fin, Zakharova a parlé d’une prétendue agence " RussiaToday " en Ukraine : " RussiaToday sur le territoire ukrainien était une agence de partenariat pour l’édition russe " RussiaToday ".

Ukrinform a décidé de comprendre quel était le statut de " RIA Novosti Ukraine " et quel journaliste, russe ou ukrainien, était Vychynsky. Tout cela, étant donné que le Comité d’enquête de la Fédération de Russie  a ouvert une poursuite pénale " sur l’arrestation illégale et la traduction en justice de Kiril Vychynsky, rédacteur en chef de "RIA Novosti Ukraine ", qui, selon les informations du Comité, avait obtenu la nationalité russe en septembre 2015.

Donc, si on regarde le site de " RIA Novosti Ukraine ", on ne trouve pas d’information concernant l’édition : il n’y a aucune rubrique pour décrire ce média. On note seulement des contacts : le bureau principal et le centre de presse se trouvent à Kyiv, rue Chota Roustawelli 16. En revanche, l’autre adresse est indiquée sur la page Facebook de " RIA Novosti Ukraine " : Kyiv, rue Instytoutska 28A.

Cette " timidité " de l’édition est facile à expliquer. Avant le début de la guerre entre la Russie et l’Ukraine en 2014, cette ressource était une représentation officielle de l’entreprise nationale unitaire  "Agence russe d’information internationale (RIA) " Novosti ". Le 9 décembre 2013, dans le cadre du renforcement de l’efficacité des médias russes, Vladimir Poutine a édité un décret pour supprimer "Agence russe d’information internationale (RIA) " Novosti " ou, plutôt, pour la remplacer par une entreprise fédérale nationale unitaire " RussiaToday ", avec le fameux propagandiste russe Dmitri Kiselev comme chef. Donc, " RIA Novosti " est devenue l’un des projets d’un énorme groupe de médias de " RussiaToday ".

Selon les données du Service fédéral de supervision des communications, des technologies de l'information et des médias de masse, le 8 avril 2014, " RIA Novosti " est enregistré en tant qu’ "agence d’information " et " édition en ligne ". Son fondateur est une entreprise fédérale unitaire nationale " Agence d’information nationale RussiaToday ".

Il est évident qu’après la suppression de l’entreprise nationale unitaire  " Agence russe d’information internationale (RIA) " Novosti ", aucune représentation de cette entreprise inexistante ne pouvait fonctionner dans un autre pays. Pour pouvoir travailler légalement, il aurait fallu enregistrer une représentation de l’entreprise fédérale nationale unitaire " RussiaToday ", contre laquelle le Service de sécurité ukrainien a introduit des sanctions.

Ukrinform s’est adressé au ministère du Développement économique et du Commerce ukrainien pour savoir si la ressource " RIA Novosti Ukraine " est vraiment enregistrée en Ukraine en tant que  représentation d’une entreprise étrangère ou bien une entreprise fédérale unitaire nationale "Agence d’information nationale RussiaToday " qui est effectivement enregistrée.

Le ministère nous a donné une liste de médias russes enregistrés en Ukraine à compter du 23 mai 2018.  Selon cette liste, l’agence russe d’information internationale "RIA Novosti Ukraine" a été enregistrée le 3 février 2006 à Kyiv, à l’adresse rue Stanislavskogo 3, bureau 50. Le chef de l’agence est un certain Nikolay Borodine.

En revanche, aucune représentation de " RussiaToday ", dont Zakharova a affirmé la légalité, n’a été enregistrée.

Donc, "RIA Novosti Ukraine", serait-elle néanmoins un média ukrainien, comme Margarita Simonyan l’affirmait?

Pour avoir la réponse à cette question, Ukrinform a fait une demande auprès du ministère de la Justice ukrainien afin de savoir si la ressource "RIA Novosti Ukraine" avait été enregistrée dans le Registre national des médias écrits et des agences d’information et si Kiril Vychynsky était vraiment l’un des fondateurs des médias en Ukraine. La réponse a été claire : " Nous vous informons que selon les données du Registre, l’information que vous demandez est absente ".

Alors, il s’avère que la ressource " RIA Novosti Ukraine " est un média non – enregistré. Ce n’est pas un média ukrainien et  pas un média russe, enregistré conformément à la législation ukrainienne.

Ce qui est évident, c’est que le contenu, publié sur son site, est clairement anti-ukrainien. Pas besoin d’une expertise linguistique pour comprendre que les publications justifient l’agression de la Russie contre l’Ukraine, l’annexion de la Crimée et incitent à l'hostilité interethnique en Ukraine.

Et il ne faut pas prétendre que Kiril Vychynsky, chef de "RIA Novosti Ukraine", est journaliste. Et encore moins qu’il avait en sa possession " tout le paquet de documents ukrainiens ".

Du point de vue professionnel, c’est un commerçant, fondateur et propriétaire de plusieurs entreprises (avec tous les signes fictifs, selon les données du SBU) qui s’occupait d’activités proches des médias, mais qui n’étaient toutefois pas liées à l'activité journalistique directe. Une de ses entreprises, " Interselect ",  fonctionnait avec des d'activité qui consistaient au traitement de données et à la diffusion d'informations sur des sites Web et activités connexes.

Selon le Service de sécurité ukrainien, cette société à responsabilité limitée agissait sous l’enseigne  " RIA Novosti Ukraine ". Ses employés avaient le statut d’entrepreneurs individuels et touchaient un  salaire selon des schémas frauduleux abrités dans des évasions fiscales.

Selon les données des services spéciaux, pour dissimuler son activité, la direction de "RussiaToday"  reproduisait le modèle de la signature de l’accord sur la coopération entre l’entreprise " Interselect " et une entreprise qui portait des signes fictifs situés à Belgrade (Serbie) et  qui recevait chaque mois environ 53 000 euros en provenance de Russie. Les données comptables  prouvent que l’argent était utilisé pour les besoins de "RIA Novosti Ukraine", dont l'estimation a été approuvée directement dans le bureau central de l'entreprise bancaire fédérale " RussiaToday ".

Les agents du Service de sécurité de l’Ukraine ont déterminé qu’au printemps 2014, Kiril Vychynsky s’était rendu en Crimée où il avait participé personnellement à des actions de propagande soutenant l’annexion de la péninsule et son adhésion à la Fédération de Russie. Après son retour à Kyiv, Vychynsky a attiré des journalistes subalternes à la préparation de documents dans l'intérêt des Républiques auto-proclamées de Donetsk et de Louhansk. Ainsi, en dirigeant une vraie représentation clandestine de l’outil de propagande russe, " RussiaToday " en Ukraine, Vychynsky participait activement à des actions d’information nuisibles dans le cadre d'une guerre hybride contre notre État.

Il faut dire qu’il travaillait de manière tellement efficace qu’en avril 2014, le ministère de la Défense de la Fédération de Russie l’a décoré d’une médaille " Pour le retour de la Crimée " et en mai 2014, le président russe en personne lui a remis une médaille " Pour service rendu à la Patrie ".

Aujourd’hui. Vychynsky est accusé de haute trahison. Le Service de sécurité ukrainien affirme avoir d’autres preuves du crime que celles présentées lors d’une conférence de presse après les perquisitions et l’arrestation de Vychynsky.

Attendons les détails de l’audience du tribunal.

P. S. Le 1er juin, lors d’une audience, Kiril Vychynsky a déclaré qu'il renonçait à la citoyenneté ukrainienne, demandait à être considéré comme citoyen russe et faisait appel à Poutine pour contribuer à sa libération.

EH


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