Roman Souchtchenko parle de son séjour dans la colonie pénitentiaire d’Utrobino

Le journaliste ukrainien Roman Souchtchenko, condamné illégalement dans la Fédération de Russie, a envoyé son premier dessin de la colonie du village d'Utrobino.

Dans une lettre à ses collègues d'Ukrinform, il a également fait part de ses observations sur son nouveau lieu de séjour.

Version complète de la lettre:

«Quelques mots sur mon quotidien. Au cours du transfert, j’ai dû subir un choc culturel, qui n'était pas essentiellement lié aux conditions et aux «charmes» d’un voyage sous la contrainte (le wagon Stolypine, les conditions insalubres, les cafards de la taille d'une boîte d'allumettes, les rongeurs omniprésents, de toutes les couleurs, les moisissures, l’humidité, l’obscurité totale, la malnutrition et le froid) et au comportement envers les gens dont le statut social a changé par une décision de justice.

Le ton est formel, feint et sympathique, mais en réalité indifférent. Le dialogue, s’il a lieu, est mené sous une forme qui exclut toute possibilité de réponse. Le but est d'intimider, de blesser la dignité personnelle, d'ignorer tous les besoins légitimes ... Heureusement, tout voyage a une fin.

La deuxième semaine, j’ai été mis dans la colonie située en face du village d'Utrobino. De la fenêtre du «ventre» de ma cellule, on peut clairement voir le même type de bâtiments dans le village, ainsi que le lever du soleil quotidien à travers «l’épine» recouverte de givre. Je veux voir des dizaines, des centaines de visages inconnus. Comme lorsqu’il fait très chaud, que l’on a soif, et que l’on veut boire de l’eau fraîche verre après verre.

Il est impossible d’imaginer la détention tant qu’on ne l’a pas vécu. Vous pensez qu'il y a un temps pour lire, penser, que tout n'est pas si terrible. Mais c'est terrible, et anxiogène. Le temps se ralentit, l'orientation se perd. Cela se lit dans les attitudes, les mouvements et les comportements des personnes que l’on croise. Je ne laisserai pas ma lumière s'éteindre!

Je partage mon nouveau travail, il s'agit d'une copie d’un dessin perdu, la «Cathédrale de Rouen». De nouvelles couleurs y sont apparues: c’est le kissel rose de Kirov, dilué avec du pastel. L'administration a permis à notre consul de me passer une série de pastels (24 pièces!).

Chers amis et collègues! Bonne année et bonnes vacances de Noël à vous et à vos proches. N’oubliez pas la santé, le bonheur et le rire des enfants à la maison.

Cordialement vôtre, Roman Souchtchenko». 

20.11.2018

Kirovo-Tcherepets, Utrobino.

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EH